Anathema

I've lost my mind.




J’ai comme l’envie de retirer les choses. Une à une. Il y a quelque chose dans mon sang. Du trop d’alcool peut-être, autant que de n’importe quoi, que ce soit de l’amour, de la niaise passion ou bien je ne sais quelle minuscule chose périmée qui vous serre les muscles & vous donne les mots difficiles. Les draps sont sans dessus & sans dessous, retournés, étalés & sales. Du sang dessus, j’ai oublié de quelle personne il s’est déversé. Autant que j’ai oublié si c’est moi qui l’avait étalé là, après avoir martelé doucement & avec attention, ou s’il était sorti seul, comme quelque chose de presque libre de s’enfuir.
 
Je garde le souvenir des corps, pas des mots, parce que je ne veux pas me rappeler de la couleur qu’ils donnaient au jour où je les ai entendus. J’y préfère un peu de sueur & de violence, parce cela rend les choses grises & coulantes, qu’ainsi tout est plus défini & cadré. Je garde le souvenir des mimiques, des traits du visages stupéfaits & construits en fonction d’une émotion, mais j’ai oublié laquelle. Je sais qu’ils sciaient le visage en le tordant de rides, & que j’ai ri en voyant à quel point c’était complexe. & à quel point ça voulait parler à mes yeux sourds, en vain. Je garde le souvenir du demi-plaisir, de cette sorte de sensation mi-amère, du calme menteur de l’ensuite, & d’un ensemble de syllabes inutilement prononcées, parce que c’est l’usage de parler dans une sorte de fatigue fatidique.
 
Je n’ai pas quitté la chambre, j’y ai bu quelque chose en écoutant de la musique. Le corps était certainement là, mais comme oublié par la pièce & par la voix de je ne sais plus qui. J’avais du mépris dans le sang, je pouvais le sentir, le toucher avec mes doigts & palper la bosse tordue qu’il dessinait sur mes veines. Je voulais le cracher dans la pièce, le vomir sur les objets & sur la voix , le vomir par-delà la voix, juste derrière. J’ai vu le corps. J’ai voulu le toucher, le prendre encore une fois, parce que mon sang retournait mes veines & que c’était facile ; qu’il suffisait de s’allonger, de ne rien faire que de décider de l’endroit où s’infiltrer, d’enfin tordre sa propre peau en utilisant celle de l’autre.
 
C’est là que je ne sais plus ; si je suis parti, si j’ai quitté les objets informes & le corps putride, ou si j’ai frappé avec la bouteille qui avait dilué l'alcool dans mes veines. Si j’ai créé du sang ou si ce dernier est venu seul se poser dans mes mains & sur mon corps.
 

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